L’écrit fait souvent peur. Pour les mêmes raisons qu’il est important. Parce qu’il acte les choses et “laissent des traces” auxquelles chacun peut se référer si besoin. Alors écrire laisse la croyance que “ce sera pire “après”. La situation peut empirer oui, si cet écrit est une déclaration de guerre. Mais un écrit factuel et transparent ne peut pas envenimer une situation.
Longtemps je me suis dit que ce besoin d’écrire n’était qu’une déformation professionnelle de juriste, un tic de casse-pied procédurier 😉 Mais plus le temps passe, plus je m’aperçois combien l’écrit a de l’importance dans la relation de travail. Il permet de clarifier la relation et son contenu, d’identifier les responsabilités de chacun et les règles de fonctionnement applicables.
Sommaire
Poser le cadre clairement
L’organisation à l’oral, s’avère toujours assez simple. Tout semble parfaitement s’emboiter comme par miracle. Mais si l’on ne prend pas le temps de poser les choses par écrit, il est difficile de voir la situation dans la globalité et de s’assurer de la cohérence du cadre. Avons-nous tout poser clairement pour qu’il fonctionne concrètement? Avons-nous pensé à tous les “petits détails” qui n’en sont pas et qui risquent d’être bloquants à un moment? Chacun connait-il sa place et ses responsabilités? Les modalités de fonctionnement entre les parties sont-elles clairement définies?
Passez par l’écrit permet tout de suite de voir si le cadre est clair. Si il ne l’est pas ou s’il manque des éléments, il devient impossible d’écrire un mot. Un exemple tout simple : la rémunération convenue est-elle en net ou en brut? Selon l’angle où vous vous placez, il se peut qu’une partie ait compris salaire net là où l’autre aura compris salaire brut. S’il n’y a pas de contrat ou d’écrit, le malentendu éclatera au moment du règlement de la prestation, créant des tensions qui auraient pu être évitées en amont, si le cadre avait été clairement posés entre les parties.
Comprendre ce qu’on attend de nous
Dans un monde professionnel qui manie les concepts à tour de bras, il est parfois difficile de comprendre ce qu’on attend de nous concrètement. Les objectifs des entretiens annuels d’évaluation sont souvent représentatifs de ce travers. Personne ne comprend vraiment la teneur de l’objectif, à commencer par le manager qui lui même le tient de son manager qui lui même le tient du comité de direction qui lui même ne fait que décliner les grands concepts de sa RSE (responsabilité sociétale des entreprises). Dès lors, comment atteindre un objectif qu’on ne comprend pas? Dont on ne sait pas, concrètement, ce qu’il recouvre? De la même manière, comment remplir une mission qui n’est pas clairement définie?
Passer par l’écrit permet là encore de clarifier la situation en posant les questions. Si le destinataire n’a aucun mal à répondre tant mieux : les choses sont claires, vous savez ce qu’on attend de vous, vous pouvez agir dans ce sens. Si il n’arrive pas à répondre, c’est que manifestement quelque chose est à revoir. Cela vous évite alors de vous épuiser à essayer de remplir une mission bancale.
Exprimer son désaccord, ses réserves
Vous n’êtes pas en accord avec le contenu d’un email ou d’un courrier qui vous est adressé? Y répondre est primordial. Pourquoi? Pour exprimer votre version des faits, comment vous avez vécu la situation. Outre le fait que s’exprimer fait du bien, la démarche permet d’apporter un éclairage à l’autre partie qui souvent, n’a pas la même vision de la situation et ne dispose pas des mêmes informations. Cela peut paraitre étonnant mais c’est souvent le cas. Un RH par exemple, aura très souvent la version de “l’employeur ou du manager”. Plus rarement celle du salarié. Dès lors, si le salarié ne s’exprime pas, qui pourra connaitre sa version des faits?
La mission qui vous est confiée vous parait difficile à remplir pour différentes raisons? Là encore, l’exprimer est important, en expliquant là encore concrètement en quoi et pourquoi il vous parait difficile de remplir l’objectif qui vous est fixé.
S’exprimer ne veut pas dire que le désaccord disparaitra ou que la mission sera revue. Mais il permet au moins de rétablir un équilibre dans la relation et de prévenir l’autre partie. Et de prévenir un éventuel contentieux.
Je vous laisse avec deux petites maximes qui pourraient à elles seules résumer cet article
“Qui ne dit mot consent” – Autrement dit, qui ne fait pas d’objections donne implicitement son accord avec le cadre proposé, reconnait implicitement les faits qui lui sont reprochés ou accepte la mission qui lui est confiée sans réserve.
“Les parole s’envolent, les écrits restent” – Passer par l’écrit ancre les choses. Le cadre est défini. Les questions sont posées. les réponses et les non-réponses aussi. Le tout est d’écrire dans l’idée et l’envie de questionner, structurer, clarifier, construire, exprimer, partager. Pas dans celle de déclarer la guerre ou de déverser sa colère.
merci pour cet article. Je suis très contente de lire qu’écrire “permet de savoir si le cadre est clair” cela me rappelle un problème rencontré il y a quelques années: une erreur de la part de ma responsable (fait signalé mais qui n’a pas été entendu, et je savais que le mois suivant cela reviendrait sur le tapis) qui a eu des conséquences assez grave sur une personne…bref, cette responsable me demande plusieurs semaines “d’arranger le coup” aussi je lui ai demandé de me préciser exactement ce qu’elle attendait de moi par écrit et devinez la suite…bien sûr, elle ne l’a jamais fait !!!!
Le cadre était très clair pourtant, c’était la personne qui ne l’était pas !!! lol !
Merci Lou pour ce partage d’expérience. Oui, si une personne a envie d’entretenir le flou, de ne pas se positionner et prendre ses responsabilités, l’écrit devient difficile…(-;
J’adore ton image ! Elle m’éclate. “Ecrire c’est ranger le bordel qu’on a dans sa tête”, c’est tellement vrai ! Et c’est aussi pour cela que l’écrit a du poids, un écrit est pris comme une parole réfléchie. Bise à bientôt !
Je l’adore aussi!! Et quand le bordel fait de la résistance…difficile d’écrire. C’en est impressionnant. Mais en persévérant, on arrive toujours à le ranger et à poser du coup quelque chose de clair et de réfléchi. merci pour ta visite et ton com Tristan